À table avec Mélanie Joly
Mélanie qui à la mairie ?
La Presse
Mélanie Joly a à peine 34 ans, des yeux bleu clair comme un ciel de canicule, un sourire franc à la Hillary Clinton, des idoles qui s’appellent autant Lévesque que Trudeau ou Obama et déjà un parcours totalement diversifié. Elle a étudié à Oxford, travaillé comme avocate dans un grand cabinet, fondé un groupe de réflexion politique, Génération d’idées, et elle a dirigé un cabinet de relations publiques, Cohn & Wolfe, entre des voyages qui l’ont menée du Honduras à New York en passant par Copenhague et Barcelone, villes qu’elle adore.
Depuis quelques semaines, elle est en pause, en réflexion. Il est fort probable qu’elle se lance comme candidate indépendante à la mairie de Montréal. C’est pour cela que son nom circule beaucoup dans les médias actuellement. Mais sa décision finale n’est pas encore arrêtée et elle ne veut pas discuter de potentielles alliances avec un autre candidat possible, Marcel Côté ou Louise Harel de Vision Montréal ou tout autre parti ou candidat. Il devient toutefois très clair, en lui parlant, que la mairie, elle, est un projet qu’elle considère sérieusement.
Je la rencontre au Bouillon Bilk, sur le boulevard Saint-Laurent, dans le Quartier des spectacles, un restaurant dans ses cordes, avec cuisine recherchée, mais accessible. On parle d’entrée de jeu de bonnes tables, de voyages. J’oublie presque de prendre des notes tellement la peut-être candidate à la mairie est facile d’approche. On se tutoie. On parle de Montréal.
Ce qui frappe lorsqu’on l’écoute, c’est à quel point le discours reste encouragé, encourageant. « J’aurais pu faire ma vie ailleurs, mais je suis à Montréal parce que je crois que c’est ici que je peux faire une différence », dit-elle. Et la jeune femme ne pense pas être seule à vouloir s’engager dans la vie collective.
« Je ne crois pas qu’on vive actuellement dans le chacun pour soi. Je crois que la population est prête à se réengager. La population de Montréal veut améliorer sa ville. »
Mélanie Joly est jeune, a peu d’expérience, mais elle regarde les dirigeants actuels et ne s’en fait pas en se disant que s’il y a une chose qui ne manque pas, ce sont justement les vétérans de la chose politique. « À Montréal, il n’y a pas de problème de manque d’expérience. L’expérience, elle court les rues ! »
Ce qui manque plutôt, croit-elle, c’est l’énergie, le temps, l’audace, le courage. « Mais le messie, on ne l’a pas. »
À 34 ans, Mélanie se demande quand sera le bon moment pour avoir des enfants. Parce qu’elle en veut. Mais que ce soit à la mairie ou à un autre poste rempli de responsabilités ailleurs, les mêmes questions se posent, dit-elle, sur l’organisation travail-famille. Pauline Marois a eu des bébés alors qu’elle était ministre. Là comme ailleurs, croit la jeune femme, il faut penser autrement, développer de nouveaux paradigmes. « C’est le défi des femmes de mon âge. »
Pour Montréal, la jeune femme voit un double défi. Sa propulsion au XXI
siècle, avec de grands projets qu’elle garde dans sa manche, et des améliorations concrètes du quotidien de type verdissement ou amélioration de l’expérience usager du transport en commun pour en faire un mode de déplacement choisi par tous, pas uniquement ceux qui n’ont pas le choix.Ce qu’il faut faire aussi, dit-elle, c’est un immense rattrapage. C’est trouver une façon d’aller de l’avant tout en réparant, corrigeant le fait que depuis des décennies, les Montréalais ont payé 30 % de trop pour des infrastructures de « vraiment mauvaise qualité ».
En revanche, elle a peu de patience pour ceux qui disent que Montréal est ingouvernable. Cela l’énerve un peu, même. « Obama pourrait dire la même chose. Le président, quand il ne contrôle pas le Sénat et la Chambre, c’est
… La réalité, c’est que le maire est l’élu qui a le plus de légitimité au Québec. Il est élu directement par 1,2 million de personnes. C’est plus que le premier ministre dans son comté. » Avec un tel mandat, un maire peut aller de l’avant et faire valoir son point de vue. Écouter. Et diriger.On entend bien la spécialiste en relations publiques s’affirmer. Elle parle de leadership, d’image, d’esprit, de la nécessité de créer un mouvement qui soulève la ville, porte des idées. Comme si une des tâches cruciales du tout nouveau maire serait, d’abord et avant tout, de créer un nouvel esprit, un nouveau
, qui lierait des projets venus de partout, pas uniquement de la mairie, mais notamment de la Ville elle-même.L’administration municipale ne peut pas être uniquement composée de gens incompétents et corrompus, note M
Joly. Il y a 29 000 fonctionnaires municipaux. Parmi eux, nombreux sont les gens dévoués, intéressés, professionnels. Il y a de quoi relancer la Ville, croit-elle sincèrement. « On ne peut pas dire qu’il n’y a aucune compétence. »« En fait, je crois que Montréal est actuellement en train de toucher le fond, dit Mélanie Joly. Ce qui veut dire que maintenant, elle ne peut que remonter ! »